Interview de l'ambassadeur de France, monsieur François Gouyette.
Pour commencer est ce que vous pouvez vous présenter brièvement pour les élèves qui ne vous connaissent pas ?
Je suis ambassadeur de France en Algérie depuis le 27 septembre dernier. J’ai commencé ma carrière diplomatique en 1981, il y a exactement 40 ans, en Libye.
J'avais auparavant fait des études d'arabe, des études de droit et de sciences politiques qui m'avaient conduit à ensuite passer le concours d'entrée aux Affaires étrangères avec cette spécialité linguistique du “cadre d’Orient” destinée aux spécialistes des langues rares.
J'étais venu à l'arabe parce que je passais mes vacances dans votre beau pays dans les années 70, quand j'avais votre âge et même plus jeune. Adolescent je venais chaque été en Algérie chez des amis algériens.
Je me suis familiarisé d’abord avec l'arabe dialectal. Puis, après mon baccalauréat, je me suis inscrit à l'École des Langues Orientales pour étudier l'arabe classique et littéraire. J'ai fait six années d'études supérieures d'arabe, parallèlement à des études supérieures de droit et de sciences politiques qui m'ont ensuite amené, je vous l'ai dit, à ce concours des Affaires étrangères.
Pendant 40 ans, j’ai vécu dans les pays du monde arabe, dont 20 ans en tant qu’ambassadeur. D'abord aux Émirats arabes unis en 2001, puis en Libye, en Tunisie, en Arabie Saoudite, et enfin en Algérie. Auparavant, j'ai occupé d'autres postes. Des postes à Paris, bien sûr, mais aussi des postes à l'étranger. Notamment en Syrie et en Turquie, où j'ai été numéro deux de nos ambassades. Voilà, vous connaissez à peu près mon parcours professionnel et universitaire.
Votre formation était l’objet de notre deuxième question. Vous y avez répondu mais nous avons aussi d’autres questions que se posent nombre de nos camarades qui se prédestinent peut être à un avenir dans la diplomatie. Quelles sont les spécificités de votre métier. Qu'est-ce qu'être ambassadeur ? Quels sont vos côtés préférés du métier et ceux que vous aimez un peu moins ?

Avant la fonction d'ambassadeur, il y a le métier et la carrière de diplomate. On accède aux fonctions d'ambassadeur qu'après un certain nombre d'années d'expérience, après avoir gravi des échelons dans la carrière en accumulant des expériences dans des postes à Paris, à l'administration centrale du ministère, ou à l'étranger, avec différentes fonctions.
Souvent on commence comme rédacteur dans une direction du ministère où l’on s'occupe d'un pays avant d’aller en poste à l’étranger. A l'époque où je suis entré au ministère, on pouvait encore envoyer un jeune fraîchement reçu au concours dans un autre pays. C'était mon cas, exceptionnel certes, mais encore possible de mon temps contrairement à aujourd’hui. J’ai réussi le concours au début du mois de juin 1980 et fin janvier 81, j'arrivais en Libye. J'étais, en quelques semaines, propulsé du statut d'étudiant que j'occupais encore quelques mois auparavant à celui de diplomate débutant.
Aujourd'hui, ce n'est plus imaginable. On passe au moins deux voire trois ans au ministère pour se familiariser avec le fonctionnement de l'administration centrale. Pour voir comment l’'on travaille à Paris etc... Et c’est seulement après que l’on vous envoie en poste à l'étranger. C’est le cas de nos jeunes diplomates à l’Ambassade.
Les spécialités sont très diverses. Évidemment, il y a différents métiers. Il y a la rédaction de notes, l'analyse politique, la presse mais il y a aussi tout le secteur culturel, les affaires économiques, les affaires consulaires et les affaires administratives, budgétaires, financières. C'est très vaste.
Dans l'administration il y a des catégories : A, B, et C. Dans les catégories C, On trouve surtout des agents d'exécution, secrétaires, assistants... En catégorie B c'est les agents d'encadrement, surtout dans des domaines administratifs et consulaires. Et puis, vous avez, en catégorie A, des diplomates qui ont vocation à occuper des fonctions de direction, soit au ministère, soit dans les métiers de chef de poste consulaires, consul général, voire ambassadeur. Certains se spécialisent aussi dans le domaine culturel.
Le diplomate, en principe, doit avoir une connaissance générale de l'ensemble des métiers, si j'ose dire. Il doit être compétent, avoir une connaissance dans tous les domaines, consulaire, économique, il doit pouvoir suivre tous les dossiers, suivre l'actualité, l'analyse politique... Il doit aussi savoir communiquer pour gérer les contacts interpersonnels avec les autres diplomates, les autorités ou la société civile. C'est donc un métier complet et finalement très, très riche, très varié mais surtout très beau. Très honnêtement, c'est un privilège de l’exercer.
Même si aujourd'hui, on considère que c'est moins prestigieux que ça l'était il y a 40 ans et que les moyens du ministère ont été réduits, cela reste à mes yeux une très belle vocation qui vous donne une ouverture sur le monde extraordinaire, qui vous permet de voyager et aussi de découvrir des pays, des cultures, des civilisations, d'y passer quelques années, de tisser des liens personnels, amicaux, de faire des rencontres formidables.
Après, il existe des contraintes, souvent familiales. Par exemple, dans un couple, le conjoint ou la conjointe du diplomate doit parfois renoncer à son métier, ne pouvant l’exercer à l’étranger. Les enfants sont aussi contraints de suivre leurs parents et sans cesse changer de cadre de vie. Ce n'est pas toujours facile. Il peut aussi y avoir des contraintes de sécurité, des situations pas toujours optimales.
Mais tout compte fait, c'est un métier formidablement intéressant. Pour pouvoir l'exercer, il faut avoir des prédispositions, une certaine appétence pour l'international, notamment. Il faut aussi avoir une curiosité intellectuelle pour l’autre, pour d'autres civilisations, pour d'autres cultures, pour d'autres langues. Il faut aussi avoir, c'est important, le sens du service public et le sens de l'État. Le sens du service public ça veut dire rendre service. Et le sens de l'État, celui de servir son pays. Il est clair qu'on n'est pas là uniquement pour des raisons alimentaires, on est là pour servir la France, pour servir le pays, la patrie, la politique du gouvernement démocratique ; les diplomates loyalistes, légalistes, sont tenus à une totale neutralité même s'ils peuvent avoir des convictions politiques à titre personnel. Ils ont une obligation générale de réserve qui s'impose aux fonctionnaires en général et aux diplomates en particulier. Et donc, voilà, ils ne peuvent pas avoir d'état d'âme.
Quelque part quand on est ambassadeur on renonce à ses convictions politiques ?
Non pas du tout. Quand on est ambassadeur, d'abord, on est nommé par le président de la
République. Si on a un problème de conscience avec la politique générale du gouvernement, on n'accepte pas d'être nommé ambassadeur, on renonce. On peut aussi décider de démissionner, de prendre sa retraite, ou d’opter pour une voie de garage (professionnellement : situation où on est mis de côté sans perdre son emploi).
Mais en revanche, ça ne veut pas dire que tous les agents ont des convictions politiques. Certains n'en n’ont pas du tout, en sont totalement dénués. Ça arrive assez souvent. Ils sont à l'image de la société et ils ne sont pas très différents des autres catégories de français.
Mais le fait d'être ambassadeur, ça ne vous oblige pas à renoncer à vos convictions politiques pour autant que vous les gardiez pour vous même. Et pas pour en faire la promotion.
Tout à l'heure vous avez mentionné votre attachement à l’Algérie, est ce que c'est ça qui a influencé votre choix de vous installer ici et votre intérêt pour la langue arabe ?

Evidemment ! J’ai fait toute ma carrière dans le monde arabe. Je me suis toujours intéressé à l'Algérie pour y avoir passé mes vacances. J’y ai beaucoup d'amis, des attaches, ma femme est d’origine algérienne. Pour moi, c'était en quelque sorte logique que je puisse servir la France en Algérie, en essayant, de par mon parcours et ma personnalité, de contribuer à ce que cette relation soit la meilleure possible. C'est dans ce contexte là que j’ai pris mes fonctions. Il y avait une logique personnelle quelque part à ce que je puisse demander ou souhaiter venir en Algérie.
De quels accomplissements êtes-vous le plus fier ?
Accomplissements... Il y a eu des situations parfois difficiles. En tout cas, jeje suis fier de l’action que j’ai menée au service de mes concitoyens et des agents de l’ambassade en Libye au moment des événements de 2011.
C'était une situation de très grande tension. C'était une crise internationale majeure. En tout cas, je ne parle pas de la guerre, je parle des événements du Printemps arabe. Souvenez-vous, ça a commencé en Tunisie, puis en Égypte, puis en Libye. J'étais encore à l'ambassade de France en Libye à ce moment-là. En quelques jours, la situation a basculé au point que nous avons dû fermer le poste diplomatique et évacuer la communauté française.
J’ai été fier, j'ai plutôt eu le sentiment du devoir accompli en tout cas, en organisant en bon ordre les choses, notamment l'évacuation de près d'un millier de français et leurs familles, en allant pour les accompagner jusqu'à l'avion en négociant, pour s'assurer que leur départ se faisait dans de bonnes conditions, dans un contexte pas facile.
La situation commençait vraiment à se tendre considérablement. C'est un souvenir qui n'a pas été très agréable parce que nous avons quitté la Libye en quelques jours, même en quelques heures. Mais je suis satisfait d'avoir pu organiser en bon ordre le départ de tous nos ressortissants, puis le départ des agents de l’ambassade, y compris les employés locaux que nous avons tenus à ramener en France. C'était primordial. Ce n’est pas très connu mais nous avons ramené un certain nombre d'employés libyens de l’ambassade de France qui risquaient d’être menacés s’ils étaient restés.
On a vraiment pris soin de nos employés et salariés, on les a ramenés en France, on leur a trouvé un logement, trouvé un travail, ils ont continué à être rémunérés. On a veillé à les placer, à faire régulariser leur situation. Quand on dit que la France accueille mal les étrangers, en tout cas elle a su, elle sait parfois et souvent se montrer à la hauteur et accueillir ceux qui l'ont servie.
Vous avez travaillé en Libye et dans d'autres dans certains pays où les conditions étaient assez difficiles. Comment avez-vous vécu cela ?
Assez difficile...pas vraiment. Même en Libye avant la guerre civile, avant les évènements de 2011, ce n'était pas difficile. Ce n'était pas l'Irak ou l'Afghanistan, d’ailleurs la vie s'ouvrait à ce moment-là vers la fin des années 2000. Il n'y avait pas trop de contraintes et dans les autres pays où j'ai été également. La Syrie, que j'ai connue dans les années 90, n'est pas la Syrie d’aujourd'hui. C’était un pays avec un régime très particulier évidemment. Mais la vie quotidienne était tout à fait normale. Non, je n'ai pas été dans des postes ou je ne me sentais pas en sécurité.
Vous avez également été ambassadeur en Arabie Saoudite, étant un pays à l’image relativement “fermée”. Que pouvez-vous nous dire là-dessus ?
Je dirais que c’est une idée reçue qu’il convient de corriger. Parce que l'Arabie saoudite d'aujourd'hui n'est pas ce qu'elle était déjà lors de mon premier séjour. J’y ai déjà vécu dans les années 80. Mais elle est très éloignée de l'image que l'on a souvent à l'étranger et notamment au Maghreb. On connait mal, c'est à dire qu’on a des préjugés qui sont fondés sur des souvenirs d'un pays qui, à l'époque, dans les années 70, effectivement, apparaissait comme celui d'où provenaient les idéologies extrémistes et où était appliquée, une conception très rigoriste de l'islam.
Cependant, les choses changent et changent même très vite. C'est ce dont j'ai été le témoin privilégié pendant plusieurs années entre 2016 et 2020. Avec effectivement la politique d'ouverture promue par le prince héritier saoudien MBS. Une politique qui continue d’ailleurs.
Depuis 2017 des changements considérables, pas sur le plan politique, mais sur le plan sociétal, ont eu lieu avec l'affirmation d'un rôle de plus en plus marqué pour la femme dans la vie sociale et professionnelle pour plus de liberté. Je ne parle pas du plan politique, j'insiste, mais sur le plan de la vie en société, la mixité devient maintenant de plus en plus répandue alors qu'elle était quasiment interdite : les restaurants sont maintenant mixtes, les contraintes posées du côté vestimentaire se sont beaucoup allégées. Le port du voile n'est maintenant plus obligatoire. Et surtout, le rôle de la police religieuse a été quasiment réduit à néant. Il y a donc eu une modernisation qui est intéressante : l'ouverture au tourisme... Ouverture dans tous les domaines sauf dans le domaine politique.
Passons à un autre registre si vous le voulez bien. Quelles sont les missions de l’ambassade à différentes échelles et sur quels projets travaillez-vous ?
Les missions de l'ambassade sont multiples. Elles sont d'abord de représenter la France dans un pays étranger. L’ambassadeur est nommé par le président de la République, il représente la France auprès des autorités du pays d'accueil, il est accrédité auprès d’elle et présente des lettres de créance. C’est une lettre par laquelle le président, le chef de l'Etat, accrédite un ambassadeur auprès d'un autre chef de l'Etat.
Quand je suis arrivé ici, j'ai très vite présenté à monsieur Tebboune mes lettres de créance par lesquelles monsieur Macron m'a crédité comme représentant auprès des autorités algériennes.
C’est donc une fonction de représentation : je suis l'interlocuteur des autorités en Algérie et elles sont aussi mes interlocutrices : le gouvernement, les ministères dont le ministère des Affaires étrangères d'abord, bien sûr.
L’une des missions est aussi de rayonner sur tous les domaines où la France souhaite exercer une influence pour promouvoir ses intérêts économiques par exemple ou les relations avec la société civile, le monde associatif, les partis politiques, la presse... Toutes des fonctions de représentation, de communication aussi et d'explication de ce qu'est la France et sa politique.
On a des services pour ça : un service de coopération et d’action culturelle, un service économique, un service de presse... Il y a une fonction de communication, ce qu’on appelle le soft power : le fait d'exercer une influence ouverte, de par les qualités que nous essayons de valoriser dont nos capacités dans tous les domaines universitaires, la promotion de l'attractivité de la France dans le domaine économique, de l'éducation, de la culture…
Il y a aussi une fonction, évidemment, d’analyse, d'observation de la société. Chaque ambassade dans le monde analyse et rapporte à sa capitale ce qu'elle observe, essaie d'anticiper sur les évolutions pour comprendre ce qui se passe dans un pays : sa situation politique, économique, sociale... C'est à la fois l'analyse politique, la représentation et puis, il y a tout l'aspect de la communication, la valorisation de tout ce que la France peut apporter en termes de coopération.
Il y a aussi tout ce qui concerne la protection des communautés françaises, puisque nous avons des ressortissants. En Algérie c'est particulièrement le cas et ce sont très majoritairement des binationaux ; dans un pays comme la Suisse, par exemple, ou à Londres où il y a un peu plus de 200.000 Français qui résident, il s'agit de leur apporter l'assistance dont ils ont besoin, qu'il s'agisse d'une assistance consulaire, administrative, de protection lorsqu'ils ont un problème judiciaire...
C'est extrêmement vaste, il y a les visas, un sujet que l’on connaît très bien en Algérie. Ils relèvent d'une compétence européenne aujourd'hui, pas exclusivement, mais très largement. Il y a toute notre coopération en matière culturelle et éducative : les lycées, les établissements d'enseignement gérés par l’AEFE et la Mission Laïque avec qui nous collaborons.
Nous travaillons aussi avec les services économiques, les chambres de commerce qui sont des organismes qui concernent le monde des affaires mais avec qui nous coopérons en bonne intelligence tout en respectant leur indépendance.
Enfin, en Algérie, nous avons ce qu’on appelle un magistrat de liaison, qui est un fonctionnaire du Ministère de la Justice envoyé dans les pays où nous avons une coopération judiciaire.
Donc tous les services de l’Etat sont représentés ici.
On sait que la France a un très grand réseau diplomatique, le troisième au monde. A votre avis pourquoi la France place autant d'espoir sur la représentation à l'étranger ? Et en quoi cette stratégie est-elle à privilégier?
Parce que la France reste quand même une grande puissance, ce n’est pas moi qui vous dirais le contraire, même si elle n’est plus celle qu'elle était au 19ème siècle. Elle reste tout de même une puissance nucléaire, un des membres permanents du conseil de sécurité. C’est aussi un très grand pays qui a un soft power important sur la scène internationale, donc elle a un réseau diplomatique qui est à la mesure de son influence et aussi de son histoire (pour le meilleur et pour le pire). C'est un réseau qui est à la mesure de l'importance du pays qu'il représente pour parler de la Chine, des Etats-Unis. Je pense que les Russes ne sont pas très loin non plus. Les Britanniques aussi. On parle de grands pays.
Donc le réseau diplomatique est une conséquence de l’influence de la France plus que l’influence est une conséquence de son réseau diplomatique ?
Il y a une interaction, entre autres, entre l'ambition qui est la nôtre d'avoir un rayonnement international en nous dotant d'un outil diplomatique et d'un réseau très vaste et puis, la réalité, qui est celle d'un pays qui reste tout de même l’une des grandes puissances mondiales. Moi, je n'ai jamais été partisan de la forme d’un président de la République récemment décédé, qui parlait d'une “France puissance moyenne”. Pour moi la France reste une grande puissance. Ce n'est pas la plus grande. Ce n'est pas une hyperpuissance comme dit Hubert Védrine, mais ça reste tout de même une grande puissance. Le fait d'être membre permanent doté de l'arme nucléaire vous classe parmi les premiers.
Quant au fonctionnement de la diplomatie française, on se demandait si elle était très centralisée et donc si c'était le ministre des Affaires étrangères qui vous donnait toutes vos orientations ou arrive-t-il à l’ambassadeur de prendre des décisions fortes ?
Cela dépend dans quel domaine. Dans le cadre de la mission qui est la sienne, il doit prendre des décisions tous les jours. En fonction du contexte, il est possible que l’ambassadeur soit amené à prendre des décisions quotidiennes. Il y a des arbitrages, mais après, s'agissant de la politique extérieure du pays qu’il représente, l'ambassadeur ne prend pas de décision. Il est tenu par les instructions qu'il reçoit du ministère des Affaires étrangères, clairement. Il n'agit pas sans instructions. Il y a une marge de manœuvre, de discussion dans le cadre de ses contacts, mais s'agissant de décisions qui engagent le pays qu'il représente, il est tenu par les instructions qu'il reçoit de sa capitale.
Pour autant, vous savez comment fonctionne la 5ème République, le principe sur lequel elle est fondée, même si ce n'est pas dans la Constitution, ce qui s’appelle le “domaine réservé” qui a été reconnu par la pratique institutionnelle en France, qui confère au président de la République en matière de politique étrangère et de défense le statut de décideur. En vertu de celui-ci, le ministre des affaires étrangères se charge de la diplomatie mais est sous la guidance du président qui reste décideur principal et final de politique étrangère.
Le président dispose d'un domaine régalien réservé qui en fait le principal décideur. C'est lui qui tranche et qui décide. Il fixe des orientations et les ministres exécutent en réalité, même s'il peut avoir plus ou moins de proximité avec le président, une marge de manœuvre importante… Mais en dernière analyse, c'est le président qui est décideur ultime.
Pouvez-vous nous parler du rayonnement culturel du français ?
Il est clair que la promotion de la langue française fait partie de nos priorités parce que la réalité est qu’elle a perdu une partie du prestige qui était le sien il y a un siècle. Elle reste néanmoins parlée par plusieurs centaines de millions de locuteurs et va être de plus en plus parlée, notamment à la faveur d’une Afrique francophone à la progression démographique exponentielle.
On voulait également parler du réseau de l'éducation (AEFE) et du LIAD en particulier. Quel rôle joue-t-il dans le rayonnement français ?
C'est le seul lycée français reconnu en Algérie et il est un peu l'héritier de ce qu’on appelait le lycée Descartes jadis. Il accueille une majorité d’élèves algériens ou franco-algériens.
Il n’est d'ailleurs pas qu’à Alger, il est aussi à Oran et Annaba ; nous souhaitons d'ailleurs pouvoir étendre ses capacités d'accueil à Oran, mais l’on se heurte à des difficultés que vous connaissez, qui sont notamment l'inadéquation entre la capacité d'accueil et les demandes exponentielles qui sont présentées chaque année ; c'est vraiment un outil précieux pour assurer à la fois la diffusion de la langue française, dans un cadre éducatif d’enseignement public.
Le LIAD, évidemment, est un vecteur d'excellence et tous ceux qui y obtiennent leur bac, ont vocation aux études universitaires ensuite, s'ils le souhaitent, en France ou à l'étranger. Nous accordons une grande importance à cet établissement et à son bon fonctionnement. Et d'ailleurs nous sommes satisfaits de voir que c'est le cas. J'ai pu y aller voir vos “collègues”. A chaque fois, j'ai été favorablement impressionné par la qualité et la maturité des jeunes : vous pourriez déjà être en première année de fac !
Il y a aussi d'autres organismes qui permettent de favoriser aussi ce courant-là. Je pense à Campus France, par exemple, qui est chargé de sélectionner les étudiants algériens qui seront éligibles à des bourses… Il y a actuellement près de 30 000 étudiants algériens en France et un intérêt toujours plus marqué pour les études dans notre pays. Campus France a pour mission, justement, de promouvoir l'attractivité du système éducatif français mais aussi de fixer des critères de sélection. On ne peut pas non plus accueillir tout le monde, c'est évident.
Pour rester dans le cadre du LIAD, et cela sera notre dernière question, quel message voudriez-vous adresser à l'ensemble de nos camarades ?
Écoutez, je crois que c'est pour eux une chance et un privilège de pouvoir effectuer leur scolarité dans un établissement d’excellence avec des conditions de travail qui sont encore assez exceptionnelles en termes d'équipements, d'encadrement, de qualité de l'enseignement... C'est une chance et beaucoup aimeraient pouvoir bénéficier de telles conditions. Je crois qu'ils doivent en être conscients. Et puis, de leur côté, fournir un maximum d'efforts. Être à la hauteur de ce qui est attendu de nos élèves, à savoir d'arriver au bac, si possible avec mention, donc il faut vraiment travailler. Mais voilà, vous serez évidemment marqués par votre expérience et les années que vous aurez passées en acquérant à la fois une culture, une capacité de raisonnement, un sens critique aussi qui pourront être mis à profit dans vos carrières ultérieures.
- SMAHI Racim, T3, rédacteur.